Dans mes pas à Kyôto… premier jour

Publié le par Juliette Amans

 

 

Enfin, te voilà. Rêvée, imaginée, lue. Avalés, tes moindres détails. Dévorées, chacune de tes histoires. Ancienne capitale impériale (de 794 à 1868), berceau des traditions nippones, cœur battant du pays. Théâtre de Geisha*, lu avec passion et point de départ d’une passion pour le Japon.

Kyôto. Me voilà partie à l’assaut de tes minuscules ruelles, de tes innombrables temples et sanctuaires, de tes quartiers mythiques et de tes monuments classés au patrimoine mondial de l’Unesco. Quatre jours pour te découvrir, c’est peu. Mais c’est intense, passionné, fascinant. Accrochez-vous : vous voilà à Kyôto !

 

 

 

Nord de la ville, soleil de plomb et écoliers par dizaines. En ce mois de juin, c’est la période des voyages scolaires.

 

Première visite : le Daitoku-ji, ensemble de vingt-quatre temples bouddhistes appartenant à l’école zen Rinzai, élevé en 1319 par l’empereur Go-Daigo.

 

Nous découvrons notre premier jardin japonais au sein du temple Kohô-an. Comme dans de nombreux endroits au Japon, nous pouvons déambuler au sein même de l’édifice, en découvrir salle de prière et moindre recoin, tout cela pieds nus sur les tatamis et le plancher qui craque. Les sens en éveil dans une atmosphère paisible.

 



Le Daisen-in, fondé en 1509 et classé Trésor National. Il est surtout célèbre pour son jardin sec, divisé en quatre parties entourant l’édifice. C’est l’un des plus renommé au Japon. Les étapes de la vie, l’impétuosité de la jeunesse, la sagesse de l’âge adulte et les épreuves de la vie sont représentés, symbolisés par les rochers et les fleuves de cailloux. Contemplation, méditation.

 



Le hasard nous fait découvrir le sanctuaire Kitano Tenmangû… Une jolie surprise, même si nous ne comprenons pas tout de suite où nous sommes… !

 



Plus à l’Ouest de la ville, le célèbre Pavillon d’Or, inscrit, tout comme le Mont Fuji, au patrimoine mondial de l’Humanité.

L’entrée franchie, le Kinkaku-ji surgit, tel un joyau dans son écrin de verdure. Ce pavillon de thé, entièrement recouvert à la feuille d’or, semble flotter dans les airs, au dessus de son étang. Un chemin serpente dans les jardins environnants, et nous permet de voir le Pavillon d’or sous toutes ses coutures.

(Edifié à la fin du XVIe siècle, il a été reconstruit en 1955 après avoir été incendié par un moine qui ne pouvait supporter la beauté autour de lui et avait décidé de brûler ce qui, à ses yeux, en représentait l’essence.)



 




Dernière visite de la journée : le temple Ryoân-ji (1450) et son jardin zen de sable et de pierres, considéré comme le plus parfait jamais conçu et inscrit au patrimoine mondial de l’Humanité.

 



Nous passons la soirée à Ponto-chô, l’un des deux principaux quartiers de geishas de Kyôto (cf encadré). Coincée entre la rivière Kamo et le canal Takasegawa, une rue étroite et pavée, où les voitures n’ont pas la place de passer. Ryôtei (maisons de thé) et yuka s’entassent (restaurants traditionnels avec terrasse donnant sur la rivière).

Toc toc toc toc toc. Mais quel est donc ce bruit derrière moi ? C’est celui des socques de bois d’une geisha qui trottine, kimono bleu et visage blanc.



Je l’observe, ébahie. Les chaussettes blanches, le tombé de son obi, la courbe de son kimono dans son dos, la poudre de riz sur sa nuque. « Sumimasen ? Can I take a picture with you, please ? »**.
La geiko*** se prête au jeu, prend la pause, « Arigato gozaimasu ! »****, puis repars. Elle se hâte vers une de ces mystérieuses soirées où les étrangers sont exceptionnellement admis.

Il est rare de voir l’une des 200 geisha de Kyôto****, qui ne sortent qu’en fin de journée. La chance est avec nous…



 

*       Geisha, d’Arthur Golden. (Ed. Jean-Claude Lattès, 2006)

**     « Excusez-moi ? Puis-je prendre une photo avec vous s’il vous plaît ? »

***   Geiko : nom donné aux geishas à Kyôto.

**** « Merci beaucoup ! »

 


 

Geisha ou prostitué ? Un petit point s’impose…

« Personne pratiquant un art d’agrément », la traduction littérale de ce mot japonais n’a rien de très poétique. Et pourtant, même si pendant la période Edo les geishas n’étaient rien d’autre que des prostitués de catégorie moyenne qui peuplaient les quartiers des plaisirs des centres urbains, ce ne sont pas des filles de joie. La confusion vient aussi du fait qu’au XVIIIe siècle les femmes des bateliers qui déchargeaient le long des canaux le charbon étaient parfois contraintes à la prostitution. Elles n’avaient alors pas le temps de nettoyer la suie sur leur visage, qu’elle recouvrait d’une épaisse couche de blanc, pour ressembler aux geishas. Jusqu’à l’interdiction de la prostitution vers 1750, la confusion entre les activités des unes et des autres était alors assez floue.

Une geisha était  une jeune fille vendue par sa famille à une maison de geishas (okiya) qui se chargeait de son éducation. Elle apprenait les arts traditionnels comme la musique, la danse, la cérémonie du thé et l’art floral. Un client pouvait acheter sa virginité (mizuage) et même sa liberté en remboursant l’okiya tous les frais liés à son éducation. Mais elle restait généralement toute sa vie prisonnière de cette dette.  En regardant et assistant leurs aînées, elle apprenait le port du kimono, l'art de la conversation, différents jeux, et le rapport au client. Elle courait ainsi de maison de thé en maison de thé pour égayer les dîners.

La prostitution a de nouveau été abolie en 1956, et aujourd’hui, les geisha et maiko (apprentie geisha) ont toutes choisi ce , en général vers quinze ans, et ne sont jamais obligés d’ »accorder l’oreiller ». L'apprentissage reste néanmoins long et difficile.

Les geishas ne sont donc pas des prostituées, mais plutôt des hôtesses.

 

NDLR : plus de photos dans l’album « Japon », « Kyôto ».

Publié dans Carnet de route

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